L’exécution des jugements du juge pénal en matière d’urbanisme par l’administration


La procédure en droit pénal de l’urbanisme ne s’arrête pas au prononcé des mesures de restitution ordonnées par le tribunal correctionnel.

Encore faut-il que ces mesures de restitution, notamment celles ordonnant la remise en état par démolition des constructions irrégulières, soient effectivement exécutées.

La nature des mesures de restitution

En application de l’article L480-5 du code de l’urbanisme, outre les peines pénales proprement dites telles que l’amende, le juge répressif peut mettre à la charge des personnes condamnées des mesures de restitution.

Selon une jurisprudence constante, ces dernières sont des mesures à caractère réel destinées à faire cesser une situation illicite et consistent soit en la mise en conformité des constructions litigieuses avec la règle d’urbanisme, soit en leur démolition.

Elles ne peuvent être prononcées qu’à l’encontre des bénéficiaires des travaux irréguliers et, dans la mesure où elle ne sont pas considérées comme étant des sanctions pénales en tant que telles, doivent être exécutées même en cas de changement de propriétaire de la construction litigieuse.

Si le juge pénal dispose d’un pouvoir discrétionnaire dans le prononcé des mesures de démolition des constructions irrégulières, il convient de préciser qu’en tout état de cause, les prévenus ont la possibilité, en vue de faire échec au prononcé d’une telle mesure de restitution, de se prévaloir des stipulations de l’article 8 de la CEDH.

Les mesures d’exécution des condamnations prononcées par le juge pénal de l’urbanisme

Le prononcé de l’astreinte par le juge pénal de l’urbanisme

Lorsque le juge pénal de l'urbanisme fixe un délai d’exécution de la mesure de restitution prise à l’encontre du bénéficiaire des constructions et travaux irréguliers, il peut assortir son injonction d'une astreinte de 500 € au plus par jour de retard.

Si le délai prévu par le juge répressif n’est pas respectée, l'astreinte prononcée court à partir de l'expiration de celui-ci jusqu'au jour où l'ordre a été complètement exécuté.

En pratique, ce délai prévu pour l'exécution de la démolition ne court qu’à compter du jour où le jugement, devenu définitif, est exécutoire.

Les astreintes, conformément à l’article L480-8 du code de l’urbanisme, sont recouvrées par l’Etat pour le compte des communes. Ce dernier émet alors à l’encontre de la personne condamnée un titre de perception.

L’exécution par le prononcé d’office des travaux de démolition ou de mise en conformité des constructions irrégulières 

L’article L480-9 du code de l’urbanisme dispose que « Si, à l'expiration du délai fixé par le jugement, la démolition, la mise en conformité ou la remise en état ordonnée n'est pas complètement achevée, le maire ou le fonctionnaire compétent peut faire procéder d'office à tous travaux nécessaires à l'exécution de la décision de justice aux frais et risques du bénéficiaire des travaux irréguliers ou de l'utilisation irrégulière du sol ».

Il résulte d’une jurisprudence constante que cette faculté de prononcer d’office des travaux s’impose en réalité à l’autorité administrative. C’est donc une véritable obligation mise à la charge de l’autorité administrative qui ne pourra s’en libérer que « si des motifs tenant à la sauvegarde de l'ordre ou de la sécurité publics justifient un refus » (CE, 13 mars 2019, n° 408123).

Très récemment, le Conseil d’Etat a précisé, concernant l’obligation qui pèse sur les communes d’exécuter les décisions prises par le juge pénal de l’urbanisme, que « Dans le cas où, sans motif légal, l'administration refuse de faire procéder d'office aux travaux nécessaires à l'exécution de la décision du juge pénal, sa responsabilité pour faute peut être poursuivie. En cas de refus légal, et donc en l'absence de toute faute de l'administration, la responsabilité sans faute de l'État peut être recherchée, sur le fondement du principe d'égalité devant les charges publiques, par un tiers qui se prévaut d'un préjudice revêtant un caractère grave et spécial » (CE, 5 avril 2022, n° 447631).

En pratique, la décision de la commune prend la forme d’un arrêté qui décide de procéder d’office à l’exécution de la mesure de restitution ordonnée par le juge pénal. Ce dernier peut être contesté devant le tribunal administratif au même titre que l’ensemble des décisions administratives.

Dans la mesure où la mauvaise exécution de travaux de démolition peut constituer une faute de la commune susceptible d’engager sa responsabilité, le plus grand soin doit être accordé aux mesures d’exécution des décisions du juge pénal en matière d’urbanisme.

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