CEDH et détention en quartier disciplinaire en France


La Cour condamne la France pour traitements inhumains et dégradants dès lors que les conditions matérielles de détention imposées au requérant étaient de nature à lui causer des souffrances aussi bien mentales que physiques ainsi qu’un sentiment d’une profonde atteinte à sa dignité humaine.

CEDH, 5ème section, Payet c. France, 20 janvier 2011, n° 19606/08   

A la suite d’une tentative d’évasion, le requérant classé « détenu particulièrement signalé » puis placé à l’isolement complet, est soumis à des rotations de sécurité consistant à changer fréquemment de lieu de détention afin de déjouer d’éventuels projets d’évasion. Incarcéré à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis à la suite d’une nouvelle évasion, il fut soumis à 45 jours de détention au quartier disciplinaire dont les locaux étaient très dégradés, très sales et partiellement inondés en cas de pluie. Le recours hiérarchique formé par le requérant contre la sanction disciplinaire fut déclaré irrecevable.

Concernant les rotations de sécurité, la Cour conclut à l’absence de violation de l’article 3 de la CEDH compte tenu du profil, de la dangerosité et du passé du requérant. Si la Cour admet que le transfert continuel d’un détenu peut avoir des conséquences néfastes sur sa santé et son bien être, elle considère cependant que les autorités pénitentiaires « ont ménagé un juste équilibre entre les impératifs de sécurité et l’exigence d’assurer au détenu des conditions humaines de détention, lesquelles, dans le cas présent, n’ont pas atteint le seuil minimum de gravité nécessaire pour constituer un traitement inhumain au sens de l’article 3 de la Convention ».

En revanche, concernant les conditions de détention en cellule disciplinaire, la Cour condamne la France pour traitements inhumains et dégradants dès lors que les conditions matérielles de détention imposées au requérant étaient de nature à lui causer des souffrances aussi bien mentales que physiques ainsi qu’un sentiment d’une profonde atteinte à sa dignité humaine.

Par ailleurs, s’agissant de la procédure disciplinaire, la Cour refuse d’appliquer l’article 6 § 1 sous son volet pénal dès lors que la sanction disciplinaire imposée au requérant n’avait pas allongé sa durée de détention.

En dernier lieu, concernant l’effectivité du recours du requérant contre ses conditions de détention en cellule disciplinaire, la Cour condamne la France pour violation de l’article 13 de la Convention. Elle rappelle que pour être effectif, le recours doit présenter des « garanties minimales de célérité ». Or, elle relève que le recours est non suspensif et que le directeur interrégional des services pénitentiaires doit être saisi préalablement et qu’il dispose d’un délai d’un mois pour statuer. Dès lors, le requérant ne pouvait pas bénéficier d’un recours effectif lorsqu’il était en quartier disciplinaire, le juge ne pouvant statuer avant qu’il en sorte.

Cf. Conseil d’Etat, ass., 14 décembre 2007, M. Payet, n° 306432

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