Le bénéfice de l'ASA dans la police : encore quelques efforts


Les premiers jugements en province emportent injonction au Ministère d'instruire les demandes sous quatre mois.

L'avantage spécifique d'ancienneté (ASA)

Les textes applicables

L'avantage spécifique d'ancienneté (ASA) a été institué par l'article 11 de la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, modifié par l'article 17 de la loi du 25 juillet 1994. Cette loi prévoit que « les fonctionnaires de l'Etat et les militaires de la gendarmerie affectés pendant une durée fixée par décret en Conseil d'Etat dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles ont droit, pour le calcul de l'ancienneté requise au titre de l'avancement d'échelon, à un avantage spécifique d'ancienneté dans des conditions fixées par ce même décret. »

Le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 pris pour l'application de ces dispositions législatives précise que les quartiers urbains où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles doivent correspondre « en ce qui concerne les fonctionnaires de police, à des circonscriptions de police ou à des subdivisions de ces circonscriptions désignées par arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité, du ministre chargé de la ville, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget ».

Un arrêté interministériel du 17 janvier 2001 vient fixer la liste des secteurs éligibles à l'avantage spécifique d'ancienneté. Il détermine que seules les circonscriptions de police relevant des secrétariats généraux pour l'administration de la police (SGAP) de Paris et de Versailles en bénéficient.

 

L’illégalité du dispositif appliqué

 

L'arrêté interministériel du 17 janvier 2001 est, aujourd'hui à l'origine d'une question juridique sérielle, conséquence des effets pervers du détournement de l'objet d'un texte et de l'intention du législateur.  

Sans doute, les ministres compétents ont tenté d'utiliser l'ASA comme un outil de fidélisation des agents en région parisienne, mais sans répondre aux critères fixés par la loi.

En effet, certains secteurs concernés de la SGAP de Paris et de Versailles ne posent pas de problème social ou de sécurité grave. Par ailleurs, cela paraît paradoxal que les policiers qui exercent leurs fonctions dans un service administratif la perçoivent également.

A l'inverse, de nombreux fonctionnaires de province se sont sentis lésés. Ils exercent parfois dans des secteurs fortement touchés par des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, sans pouvoir bénéficier de cet avantage, pourtant créé pour eux selon la lettre de la loi de 1991.

Cet arrêté est donc à l'origine d'une rupture d'égalité de traitement qui est aujourd'hui systématiquement censurée par les juridictions administratives.

 

Le contentieux de l’ASA

 

Suite à cet arrêté et à la mobilisation des syndicats de police, de nombreux recours individuels ont été déposés. Ils sont restés sans réponse concrète et sans aucune proposition de reconstitution de carrière, obligeant les fonctionnaires intéressés à saisir les tribunaux administratifs.

A l'issue d'un pourvoi formé par une fonctionnaire de police de Dreux, le Conseil d'Etat a estimé, dans un premier arrêt du 16 mars 2011 (n°327428) que cette qualification restreinte au SGAP de Paris et Versailles constituait une erreur de droit de la part des ministres, auteurs de l'arrêté litigieux, car elle ne prenait pas en compte le critère défini par la loi. En omettant de prendre en considération les situations des circonscriptions de police au regard de critères plus concrets, l'arrêté est alors censuré par la Haute juridiction.

Le Conseil d'Etat a condamné l'Etat au réexamen de la situation de la requérante en ayant égard à son lieu d'affectation, ne relevant pas des SGAP de Paris ou Versailles.

En l'absence de toute évolution, en se prononçant sur un nouveau recours, le Conseil d'Etat a confirmé, dans un arrêt du 24 mars 2014, confirmant sa décision de 2011, enjoignant sous astreinte à l'Etat de procéder à un réexamen de la situation de la requérante. Cette pénalité financière imposée à l'Etat à raison de 500 € par jour faute de justification de l'examen approfondi de la situation de la requérante constitue assurément une nouveauté.

 

La réponse des tribunaux administratifs sur l’ASA

 

Les magistrats bénéficient d'un outil efficace pour faire face à ce genre de contentieux important grâce aux dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative qui précise que « les présidents de tribunal administratif (…) peuvent, par ordonnance (…) 6° Statuer sur des requêtes relevant d'une série, qui, sans appeler de nouvelle appréciation ou qualification des faits, présentent à juger en droit, pour la juridiction saisie, des questions identiques à celles qu'elle a déjà tranchées ensemble par une même décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux ou examinées ensemble par un même avis rendu par le Conseil d'Etat en application de l'article L. 113-1 ».

 

Les recours devant les tribunaux administratifs sont donc examinés assez rapidement.

 

A l’inverse, le ministère de l'Intérieur qui s'est pourtant engagé à procéder à une refonte complète de l'arrêté du 17 janvier 2001, tarde à réagir. Certes cette démarche nécessite une analyse approfondie de la part de plusieurs départements ministériels (fonction publique, budget, intérieur...), toutefois elle commence à s'inscrire dans la durée au détriment des fonctionnaires intéressés comme du fonctionnement des tribunaux administratifs.

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