La responsabilité de l'Etat et délai raisonnable de jugement devant le juge administratif, Partie II


L'appréciation des délais est pondérée par les circonstances particulières de l'affaire, caractèrisées au moyen de quatre critères :

  • La complexité de l'affaire en fait et/ ou en droit
  • Le comportement du requérant
  • Le comportement des autorités judiciaires et des autorités nationales
  • La nature et l'enjeu du litige pour l'intéressé

 

1°) Sur la complexité de l'affaire :

Les éléments reconnus par la Cour comme pouvant en attester sont de nature diverse.

  • le nombre de requérants.
  • le volume et la difficulté du dossier
  • la connexité.
  • les modalités d’administration de la preuve.
  • Le comportement des parties

Ils sont mis en balance avec le principe de bonne administration de la justice.

C.E.D.H., 1er août 2000, C.P. et autres c/ France, n°36009/97, §30 à 34

2°) Sur le comportement du requérant

Il doit, en principe, faire preuve d’une diligence normale au cours de la procédure. Il peut ainsi user, de manière légitime, des divers recours prévus par la législation interne. Par conséquent, la Cour estime qu’on ne peut reprocher au justiciable d'avoir introduit des demandes de dispense de frais de justice, de désignation d'un avocat commis d'office, de consultation du dossier ou encore d'avoir répondu aux conclusions des experts.

En revanche, la Cour a pu considérer comme dilatoires, selon les circonstances de l’espèce, des conclusions tardives, une demande injustifiée de remise de l'affaire, l’absence de comparution du prévenu et de son conseil suivie d'une opposition, une absence lors des audiences, une demande d’audition ou d’expertise ou des demandes de récusation.

C.E.D.H., 28 novembre 2000, Leclercq c/ France, n°38398/97, §26 et 29-31

3°) Sur le comportement des autorités

La Cour rejette les justifications des Etats fondées sur une surcharge structurelle telle qu’un manque de magistrats, un sous-équipement, une organisation générale déficiente, le manque de moyens budgétaires, les difficultés de recrutement, la surcharge de travail, ceux-ci s’étant engagés, par leur adhésion à la Convention, à établir une organisation judiciaire qui réponde aux exigences de l'article 6.

L’Etat ne peut invoquer la complexité de l’organisation juridictionnelle pour justifier le caractère déraisonnable du délai du litige.

C.E.D.H., 19 juin 2001, A.A.U. c/ France, n°44451/98, §28 ;

C.E.D.H., 27 juin 2000, Frydlender c/ France, n°30979/96, § 45 ;

C.E.D.H., 4 juin 1999, Caillot c/ France, no36932/97, § 27.

Quant à l'argument tiré de l’encombrement du rôle, la Cour européenne a jugé une fois de plus qu'il ne saurait entrer en ligne de compte car l'article 6 § 1 oblige les Etats contractants à organiser leur système judiciaire de telle sorte que leurs juridictions puissent remplir chacune de ses exigences.

Tel est notamment le cas en matière de conflits du travail qui, portant sur des points qui sont d'une importance capitale pour la situation professionnelle d'une personne, doivent être résolus avec une célérité toute particulière.

C.E.D.H., 28 novembre 2000, Leclercq c/ France, n°38398/97, §28-31

C.E.D.H., 27 juin 2000, Frydlender c/ France, § 45.

 Une surcharge temporaire peut, en revanche, être tolérée à condition que l'Etat prenne immédiatement des mesures efficaces pour remédier à cette situation.

4°) La nature et l'enjeu du litige

Les autorités doivent déployer une diligence spéciale lorsque le requérant est particulièrement touché par un allongement du délai de jugement. Ce critère vise plus particulièrement la dignité du requérant.

La Cour fait jouer l’urgence particulièrement en matière de vie familiale, de vie professionnelle, de versement d'une indemnité à la suite de la résiliation d'un contrat, de mauvais état de santé du requérant.

Ainsi une célérité particulière s’impose lorsque la procédure risque d’être privée de tout effet utile du fait de l’espérance de vie réduite du requérant.

C.E.D.H., 31 mars 1992, X c/France, n°18020/91

Sur la computation des délais voir ce lien

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